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Thursday 21 November 2024

Vote ethnique en Guinée : Quand Alpha Condé dit haut ce que tout le monde pense tout bas (analyse)

Samedi 11 septembre, le RPG  Arc-en-ciel – le parti au pouvoir – lançait sa campagne avec fanfare à Kankan. Et c’est le discours par téléconférence du Président  Alpha Condé qui aura le plus marqué l’évènement. Même si ce n’est pas dans le bon sens.

En effet, dans son discours, Alpha Condé a appelé les malinkés à ne pas voter pour Cellou Dalein Diallo, son adversaire le plus important qu’il désigne comme le candidat du Fouta. « Sachez que pour les élections, il n’y a que deux candidats ; Cellou et moi. Quiconque vote pour un autre candidat en dehors de moi, aura voté pour Cellou. Il faut que vous le sachiez, cette bataille est entre lui et moi. Vous avez vu qu’au Fouta, aucun candidat ne s’est présenté en dehors de Cellou. Donc, tous les autres candidats qui se sont présentés, veulent l’aider. Donc, si vous les (les autres candidats) octroyez ne serait-ce qu’une seule voix, vous auriez voté pour Cellou », voilà, en partie, l’intervention du Président de la République qui prétend à un troisième mandat ( le premier de la quatrième République).  

Il ressort de ces propos du mépris pour les dix autres candidats. Mais aussi du régionalisme et de l’ethnocentrisme dans la politique guinéenne. Parlant de l’ethnocentrisme, il faut reconnaître qu’elle a toujours caractérisé la politique guinéenne. Le pouvoir de  Sékou Touré était donc perçu comme  celui des Malinkés. Après lui, c’est Lansana Conté et les Soussous qui ont dirigé la Guinée. Ensuite, il y a eu le bref passage de Dadis et les Forestiers à la tête de la Guinée avant que les malinkés ne reprennent le pouvoir à travers Alpha Condé. Il ne reste que les Peulhs qui n’ont pas encore dirigé le pays. La popularité de Cellou Dalein au sein de l’ethnie peule explique un peu l’envie de celle-ci de voir désormais –  après plus de 60 ans d’existence de la Guinée indépendante – un des leurs de diriger le pays. Au sein de la population, il est encore pour beaucoup de Guinéen une fierté de voir un membre de son ethnie diriger le pays. Les enjeux vont au-delà de cette fierté. Puisqu’on est aussi conscient des avantages tels que les nominations des membres de l’ethnie dans le gouvernement, leur recrutement dans la fonction publique, ou encore l’attribution des contrats publics… Il suffit de voir le nombre de Malinkhés dans le gouvernement et dans l’administration pour s’en rendre compte.

Tout Guinéen majeur, qui s’intéresse à la politique, peut être conscient du caractère ethnique du vote en Guinée. Surtout quand on sait que le fief d’Alpha Condé c’est Kankan ( ville des Malinkhés) et  Labé (ville des Peuls) celui de Cellou Dalein. En donnant une consigne de vote ethnique, Alpha Condé dit donc plus haut ce que tout le monde pense tout bas en Guinée. Le problème c’est qu’il n’est pas la personne la mieux placée pour tenir un tel discours à caractère communautaire. Jusqu’ici, il est le père de la nation, le Président de toutes les ethnies.

En tenant un tel discours, il démontre qu’il a été durant les 10 ans passés le Président des malinkés et non celui du Fouta. On comprend certes son envie à tout faire pour parvenir à ce troisième mandat. Mais, ce discours est indigne de quelqu’un qui entend encore diriger les Guinéens pour plusieurs années.

Ibrahima Camara

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