L’Afrique de l’Ouest a toujours été marquée par des renversements de régime. Mais ces derniers temps, on a vu apparaitre des « familles » de coups d’État, une distinction qui n’a fait qu’accentuer les tensions politiques dans la sous-région. Avec ou sans armes : voilà, en schématisant, la distinction faite par les États et les institutions.
D’un côté, on observe l’acceptation d’un coup d’État institutionnel, avec le maintien au pouvoir d’une lignée, comme celle de la famille de feu Idriss Deby Itno au Tchad. De l’autre, le rejet des coups d’États militaires, comme au Mali en août 2020 puis en mai dernier, en Guinée le 05 septembre 2021 et le Burkina Faso le 24 janvier dernier. S’y ajoute la tentative de coup d’État en Guinée Bissau le premier février 2022.
En observant tout ceci, une interrogation nous vient à l’idée. Quelles sont les raisons derrière les coups d’États, devenus fréquents en Afrique de l’Ouest ces derniers temps ?
DÉTÉRIORATION DE LA SITUATION SÉCURITAIRE
Depuis 2015, le Burkina Faso est en proie aux attaques terroristes de groupes extrémistes. Tels que “l’État islamique” et “Al-Qaïda”, qui ont fait de nombreuses victimes et plus de 1,5 millions de déplacés. Dès lors, la situation sécuritaire s’est fortement détériorée.
Les coups d’État observés en Afrique de l’Ouest, notamment dans les pays du Sahel, ont pour dénominateur commun l’absence de sécurité. Dans le nord du Mali, les groupes djihadistes ont étendu ces dernières années leur présence vers le centre, dans la zone dite “des trois frontières” (Mali, Burkina Faso, Niger), multipliant les attaques contre les symboles des institutions mais aussi contre des civils.
Lors de la 7éme édition du Forum international de Dakar sur la paix et la sécurité en Afrique qui s’est tenue en décembre dernier, le président nigérien Mohamed Bazoum a expliqué la situation chaotique dans le Sahel par la montée en puissance des groupes terroristes sur fond de crise en Libye.
Il a invité les Etats sahéliens à mettre sur pied une stratégie militaire adaptée aux défis consistants dans le recours à des techniques et des moyens de nature à rendre la guerre le moins asymétrique possible.
Pour certains observateurs, l’incapacité de l’État de faire face aux groupes terroristes, la mauvaise gouvernance sont peut-être des raisons expliquant les putschs.
FAILLES DU MODÈLE OCCIDENTAL
D’autres analystes reprochent en outre à la France d’avoir vidé la démocratie africaine de son essence.
“La France avait conditionné à la démocratie ses aides et les garanties qu’elle offrait auprès des riches nations, en faveur des Etats africains francophones”, déplore Moussa Sey Diallo, un élu communal de l’Union pour la république et la démocratie (URD) du Mali.
Selon lui, le retour des coups d’État en Afrique révèle “l’échec des politiques et l’oisiveté des intellectuels. La démocratie n’est pas du prêt-à-porter, elle doit être sur mesure”.
Quant à M. Ouattara, il estime que “la démocratie telle que conçue par les Occidentaux n’est pas l’option recommandée pour les Africains parce que nos sociétés, notre éducation, nos us et coutumes diffèrent”.
D’après de nombreux observateurs, des organisations sous-régionales, continentales et mondiales comme la CEDEAO, l’Union africaine (UA) et l’ONU doivent aussi prendre plus de responsabilités pour être des “boucliers anti-coup d’État”.
Pour sortir de ce cycle de putschs militaires, “il n’y a pas mille solutions”, soutient M. Ouattara, qui préconise qu’il faut laisser les peuples “choisir en toute liberté” leur système politique, leurs dirigeants et surtout leurs options de développement.
Tamba Pierre LENO, Journaliste