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Thursday 19 September 2024

N’Zérékoré/ massacre de Zogota :entre satisfaction et regret, les victimes parlent de souvenirs sombres (dossier)

 Pour un recrutement sollicité au sein de la société minière ( BSG-R Vallé), les habitants du district de Zogota situé dans la préfecture de N’Zérékoré au sud de la Guinée ,ont été surpris d’une attaque d’un groupe de personnes lourdement armées. Ce massacre survenu dans la nuit du vendredi 04 au samedi 05 août 2012, s’est soldé par les dégâts matériels et l’assassinat de 6 autochtones dont le chef de district. Ces faits malheureux ne sont pas restés impunis. Après l’attaque, un groupe d’avocats des victimes s’est constitué pour porter ce dossier devant les juridictions compétentes. Après plusieurs tentatives en Guinée qui n’ont point donner de résultats fiables, l’affaire fut déférée à la Cour de justice de la CEDEAO qui a tout récemment rendu sa décision en condamnant l’État guinéen au paiement de 4,56 milliards de nos francs à titre d’indemnisation aux victimes. 


Pour plus de détails dans cette affaire de plus de 8 ans, la rédaction de votre quotidien en ligne à travers son correspondant régional basé à N’Zérékoré, est allée à la rencontre des victimes de ce massacre. Assis à son domicile, l’actuel président de district est revenu sur la descente musclée des forces de défense et de sécurité dans cette autre zone de la région forestière.
« C’était dans la nuit du 04 août 2012 aux environs d’une heure du matin, lorsque les militaires, bien armés sont  venus là et tués 5 personnes. Une autre a été blessée et qui a malheureusement succombé à ses blessures à l’hôpital de N’zérékoré. Du coup, une plainte a été déposée la même année au niveau des juridictions de notre pays. Et comme l’on tardait à avoir une suite favorable, nos avocats nous ont aidé à l’orienter à la justice de la CEDEAO qui a rendu le verdict en notre faveur, il y a quelques jours», a tout d’abord expliqué Kpaklé Niandawolo Kolié, ce chef de district qui a remplacé son défunt père.

 
Parlant de la décision rendue par cette juridiction sous-régionale, le premier responsable du district de zogota dit en partie d’être satisfait. Pour lui, il faudrait absolument que les victimes ou leurs proches soient en possession de cet argent qui permettra à ceux-là qui ont perdu leur concession de pouvoir reprendre avec la construction. 
Poursuivant, il a fustigé l’indifférence des autorités guinéennes qui n’ont jamais fait un geste pour ces victimes. 
« A part  une ONG américaine qui est venue donner 180.000gnf depuis 2016, le gouvernement n’est jamais venu en aide aux différents victimes», a-t-il dénoncé avant de s’en prendre pour commanditaire de cette attaque, les autorités administratives d’alors qu’il souhaite même leur condamnation.
« C’est l’ex préfet de N’zérékoré Alexandre Sanousy, colonel Soumah, commandant de zone de n’zérékoré et le gouverneur de la région administrative de N’zérékoré qui ont commandité l’attaque de notre village. Qu’ils soient aussi condamnés en mesure de leur forfaiture».
Gouma Hégué Kpèlèyaye qui a perdu son fils Nazo Kolié, tué lors de ce massacre est revenue sur les circonstances de la mort de son enfant. « Nous étions tous à la maison jusqu’à 00h TU. Mais les coup des fusils nous ont fait peur et du coup chacun s’est enfermé dans la maison. C’est delà qu’on nous a demandé de quitter puisque les militaires arrivaient. Moi j’ai dit que je n’allais pas quitté sans mon enfant parce que je ne l’avais pas vu et je ne savais pas où il était. Mais Malheureusement il a été tué dans le massacre. Depuis donc cette date, je ne suis plus dans de bonnes conditions.  Mon mari est décédé et c’est lui qui faisait tout pour moi. Aujourd’hui il nous faut faire des contrats pour se nourrir. C’est pourquoi nous demandons à ce que les coupables soient condamnés et que nous soyons indemnisés», a sollicité la vieille dame.


Interrogée sur le sujet, Widoh Lamah, veuve du président de district tué dans cette attaque a également, abordé dans le même sens. Elle qui s’en sort difficilement à soutenir ses enfants à travers son jardin depuis la disparition de son mari n’a pas manqué de mots pour saluer la décision de la Cour de la CEDEAO. 
« Le souci majeur de mon mari était de soutenir nos enfants dans les études jusqu’à ce qu’ils terminent l’université. Voilà aujourd’hui tout repose sur moi depuis qu’il m’a quitté. C’est pourquoi je ne cesserai de saluer la décision de la cour de justice de la CEDEAO », a-t-elle indiqué. 
Le chef du village, Labilé Kolié dit être ragaillardi suite à cet arrêt de la cour de justice de la CEDEAO. Cependant, il s’est montré sceptique face au silence ‘’complice’’ que le gouvernement guinéen a toujours entretenu sur ce dossier. Visiblement choqué, cet autre habitant n’a pas manqué rougir sa colère à notre micro.
«Je ne regarde pas l’argent qu’ils ont envoyé aux victimes et à leurs familles. Mais au moment où l’acte s’est passé, est-ce-que les représentants de l’Etat sont venus nous rendre visite pour au moins soulager les familles des victimes ? », s’est-il interrogé. 
Poursuivant, l’homme part jusqu’à confier que les commanditaires de ce massacre ne sont autres que les propriétaires d’un sac contenant des munitions et gaz lacrymogène qu’il détient comme preuve. C’est pour cette raison que Labilé Kolié n’a pas manqué demander à l’État d’arrêter ces coupables qu’il en connaît et les condamner.    


Zaoro Kolié, un des détenus, a rappelé comment il a été interpellé par des hommes en uniforme .
« J’accompagnais mon père à N’Zérékoré après l’amputation de son doigt suite à l’explosion d’une grenade lacrymogène. Juste après le 1er  village de Zogota, nous avons vu un véhicule militaire. C’est là qu’on m’a pris en me retirant une somme d’un million 200 gnf que je détenais pour les soins de mon père. Ils nous ont fait monté dans leur pick-up en abandonnant moi ma moto là-bas. Une fois en ville, on a déposé mon père à l’hôpital, moi on m’a envoyé à la gendarmerie puis à la prison civile de N’Zérékoré où nous avons passé 26 jours . Il a fallu que les populations se lèvent pour exiger notre libération. On ne finira donc pas de remercier la cour de justice de la CEDEAO», a-t-il expliqué.


A la rentrée du village, sont visibles les tombes des 6 victimes tuées dont le président du district. 5 de ces martyrs selon Pépé Nikoda Kolié un témoin oculaire de ce massacre, ont été enterrés dans une fosse commune et le 6ème monument qui est le chef de district à été enterré à coté.  

De retour de Zogota, Moussa Moise Camara pour lolaplus.org   

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