Suite aux informations alarmantes qui nous parviennent de Macenta précisément de Koyamah, le Comité de Prévention et de Règlement des crises en Guinée Forestière du Conseil Supérieur de la Diaspora Forestière (CSDF) a dépêché une mission sur place afin d’analyser la situation et faire des recommandations.
La mission est arrivée sur les lieux le Mercredi 24 Juin 2020. Elle était pilotée par Dr Antoine Monemou dont voici le compte rendu
Mission à Macenta du 24 Juin 2020
Par Dr Antoine Monemou
Nous sommes arrivés à Macenta où il y a une grande méfiance et très peu de communication sur le sujet. Aucun interlocuteur ne termine une phrase complètement. Tous les visages sont attristés et abattus.
Nous nous sommes rendus à l’hôpital où nous avons trouvés 7 blessés graves (la gravité de blessure est un jugement de valeur) et nous y avons été informés que les autres sont transférés à l’hôpital régional de N’Zérékoré.
Nous n’avons pas pu aller sur le terrain (Koyama ndlr… ) par prudence sécuritaire. Toutefois, nous avons pu communiquer avec Madame la présidente des femmes et en même temps secrétaire générale du RPG à Koyama (Nyèmè Koyama Guilavogui). Nous avons aussi communiqué directement avec nombreuses personnes sur le terrain.
Les faits
Les Tomas et les Manias ont souvent vécu à Koyama dans une méfiance réciproque, même s’il n’y a pas eu un conflit ouvert entre les deux communautés dans les temps récents. Mais ces derniers temps, il y a souvent des provocations de part et d’autre, nous explique différentes sources avec des tons mélancoliques.
Pour le fait qui vient de se produire, Madame la présidente des femmes de Koyama est catégorique : « Le sous préfet (qui est arrivé il y a de cela un an environ et qui fut renvoyé de Serédou) et le Maire sont à la base de cette crise ». Pour elle et pour nombreux interlocuteurs, les « Manias » ont commencé les problèmes à Koyama quand ils ont commencé à dire qu’ils détiennent un papier leur permettant d’aller travailler sur le domaine de la forêt sacrée.
Pour un interlocuteur Mania, « le domaine dont il s’agit n’est pas le lieu de la forêt sacrée. Mais il est séparé de cette forêt sacrée par un bas-fond. Les Tomas disent que ce bas-fond est utilisé aussi lors des pratiques sacrées. C’est à ce niveau où il y a eu une incompréhension. Malheureusement, nous sommes tous perdants »
Les Manias occuperaient alors un domaine qui est réclamé par les Tomas. Depuis ce temps, ils ont commencé à occuper les abords de la forêt sacrée féminine de Koyama.
L’incident est survenu quand les Tomas ont porté plainte contre les Manias pour occupation illégale de domaine par la réalisation d’une palmeraie et profanation du lieu sacré du village. Il y a de cela environ 3 semaines.
La réaction du Maire a été sa résignation au silence. Puis, une seconde plainte pour les mêmes motifs a été faite le jeudi 18 juin 2020. La Secrétaire générale du RPG a demandé que « la plainte soit transférée à Macenta mais le Maire et le Sous préfet se sont opposée à cette idée. Ils ont d’ailleurs demandé de faire de manière que le préfet de Macenta ne se rende pas compte. »
Avec ce silence, les Tomas auraient décidé d’aller garder leur forêt sacrée. Apprenant la nouvelle, les Manias aussi auraient décidé d’aller surveiller le leur. C’est en ce moment où il y a eu l’escalade du conflit.
Actions prises par les autorités
– Envoie des forces de l’ordre dont le convoi aurait été tiré faisant ainsi 4 blessés
– Visite de terrain du Gouverneur de N’zérékoré et du Préfet de Macenta pour inviter les esprits au calme
– Présence des militaires sur le terrain
Bilan :
– Quatre (4) personnes tuées
– 76 blessés (de source hospitalière)
– Des maisons et des marchandises détruites
Suggestions/Recommandations
– Attendre le calme (même précaire) pour aller faire une visite de terrain (à Koyama) et un état des lieux exact
– Interpeller les autorités à la résolution de la crise par les moyens légaux en situant les responsabilités
– Appel du CSDF au calme
– Prévoir un appui substantiel pour les blessés à Macenta
Félix Lamah
Président du Comité de Prévention et de Règlement des crises en Guinée Forestière CSDF
