La décision a été annoncée ce jeudi 16 septembre 2021 à Accra au Ghana, entre les chefs d’État africains membres de la CEDEAO. Les échanges étaient surtout axés sur les situations politiques au Mali et en Guinée.
A cette occasion, la délégation qui s’est rendue à Conakry quelques jours après le putsch, a fait son compte-rendu à l’organisation sous-régionale. Juste après avoir écouté ce récit, la CEDEAO a préféré ne pas lever ses sanctions prises contre la Guinée, lors d’une rencontre récente et ceci, jusqu’au retour de l’ordre constitutionnel.
L’organisation a, ensuite exigé la libération d’Alpha Condé, en détention chez les unités d’élite après son arrestation le dimanche 05 septembre 2021.
Par ailleurs, aux nouvelles autorités, avec à la tête le Colonel Mamady Doumbouya, la CEDEAO exige aussi l’organisation des élections législatives et présidentielles dans un délais de 6 mois, où aucun membre du CNRD ne doit figurer parmi les candidats.
Voici, en intégralité, la déclaration de la CEDEAO :
SESSION EXTRAORDINAIRE DE LA CONFERENCE DES CHEFS D’ETAT ET DE GOUVERNEMENT DE LA CEDEAO
Accra, République du Ghana 16 septembre 2021
La Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement de la Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) s’est réunie, en Session Extraordinaire, le 16 septembre 2021 à Accra, République du Ghana, sous la présidence de S.E.M. Nana Addo Dankwa AKUFO-ADDO, Président de la République du Ghana, Président en exercice de la Conférence, afin de faire le point de l’évolution de la situation politique en République de Guinée. Les Chefs d’États ont également examiné les derniers développements de la Transition en République du Mali.
Étaient présents à cette session, les Chefs d’États et de Gouvernement ci-après, ou leurs représentants dûment mandatés :
S.E. M. Roch Marc Christian KABORE, Président du Burkina Faso ;
S.E. M. Alassane OUATTARA, Président de la République de Côte d’Ivoire ;
S.E. M. Nana Addo Dankwa AKUFO-ADDO, Président de la République du Ghana ;
S.E. M. Umaro Sissoco EMBALO, Président de la République de Guinée Bissau ;
S.E.M. Georges Manneh WEAH, Président de la République du Libéria ;
S.E.M. Mohamed BAZOUM, Président de la République du Niger ;
S.E. M. Macky SALL, Président de la République du Sénégal ;
S.E. M. Julius Maada BIO, Président de la République de Sierra Leone ;
S.E. M. Faure Essozimna GNASSINGBE, Président de la République Togolaise ;
S.E.M. Yemi OSINBAJO, Vice Président de la République Fédérale du Nigéria ;
S.E. M. Aurélien AGBENONCI, Ministre des Affaires Etrangères et de la Coopération de la République du Bénin ;
S.E. M. Filomena MENDES GONÇALVES, Ministre à la Présidence du Conseil des Ministres de la République du Cabo Verde ;
S.E.M. Mamadou TANGARA, Ministre des Affaires Etrangères, de la Coopération Internationale et des Gambiens de l’Extérieur de la République de Gambie.
Était également présent, S.E.M. Jean-Claude Kassi BROU, Président de la Commission de la CEDEAO.
Ont également participé à cette session, S.E.M. Goodluck JONATHAN, Ancien Président de la République Fédérale du Nigéria et Médiateur de la CEDEAO en République du Mali ; et S.E.M. Mahamat Saleh ANNADIF, Représentant Spécial du Secrétaire Général des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest.
Les Chefs d’Etat et de Gouvernement ont pris note du Rapport de la Mission de haut niveau dépêchée en République de Guinée le 10 septembre 2021, à la suite de la Session extraordinaire de la Conférence tenue le 8 septembre 2021 par visioconférence. Ils ont également pris note du rapport de suivi de la transition politique en République du Mali présenté par le Médiateur, S.E.M. Goodluck Ebele JONATHAN.
Ils ont salué la qualité des rapports soumis ainsi que la pertinence des recommandations qui y sont contenues.
A l’issue de ses délibérations, la Conférence a entériné les principales recommandations contenues dans le rapport de la Mission.
Sur la Situation politique en République de Guinée
La Conférence réitère sa ferme condamnation du coup du 5 septembre 2021 et réaffirme son exigence pour la libération immédiate et sans condition du Président Alpha Condé. Elle rappelle encore qu’elle tient les membres du Comité National de Rassemblement et de Développement (CNRD) pour responsables individuellement et collectivement de l’intégrité physique du Président Alpha Condé.
La Conférence a été informée de la situation socio-politique présente en République de Guinée et de l’apparent engagement du Comité National de Rassemblement et de Développement (CNRD) à œuvrer pour un retour rapide de l’ordre constitutionnel. Elle a également noté la décision du CNRD d’engager des consultations avec l’ensemble des acteurs nationaux et internationaux sur la situation socio-politique en République de Guinée. La Conférence s’est fortement préoccupée de la résurgence des coups d’État après ceux du Mali en 2020 et 2021.
Après examen du Rapport et délibérations, la Conférence décide de ce qui suit :
le maintien de la suspension de la Guinée de toutes les instances de la CEDEAO jusqu’à la restauration de l’ordre constitutionnel ;
la tenue, dans un délai de six (6) mois, des élections présidentielle et législatives pour la restauration de l’ordre constitutionnel en République de Guinée ;
la mise en œuvre des sanctions ciblées conformément aux protocoles de la CEDEAO, impliquant l’interdiction de voyage des membres du CNRD ainsi que des membres de leur famille et le gel de leurs avoirs financiers ;
l’appui de l’Union Africaine, de l’Union européenne, des Nations Unies, et des partenaires multilatéraux et bilatéraux pour la mise en œuvre desdites sanctions;
l’interdiction aux membres du CNRD d’être candidats à l’élection présidentielle ;
l’accompagnement de la CEDEAO dans la résolution rapide de la crise et la préparation des élections ;
La Conférence appelle l’Union Africaine, les Nations Unies ainsi que les partenaires au développement à endosser les décisions prises et à accompagner la restauration de l’ordre constitutionnel en République de Guinée.
Les membres de la conférence ont demandé au Président en exercice de visiter les Républiques de Guinée et du Mali dès que possible afin de notifier en personne les décisions de la Conférence.
La Conférence décide de rester saisie de cette question.
Sur l’évolution de la transition politique en République du Mali.
La Conférence demeure très préoccupée par la lenteur dans la préparation des élections prévues en République du Mali pour fin février 2022.
La Conférence réitère sa demande pour un respect strict du calendrier de la transition devant conduire à la tenue effective des élections dans le délai non négociable de février 2022. A cet effet, la Conférence demande aux autorités de la transition de soumettre au plus tard à la fin du mois d’octobre 2021, le chronogramme devant conduire aux étapes essentielles pour les élections de février 2022. Elle insiste que seules les réformes nécessaires pour la tenue des élections à la date indiquée devraient être mises en œuvre. La Conférence décide de sanctions ciblées contre tous ceux dont les actions impactent négativement sur le calendrier de la transition tel qu’arrêté par les Chefs d’Etat et de Gouvernement de la CEDEAO. Ces sanctions incluraient notamment l’interdiction de voyage pour ces personnes et leur famille et le gel de leurs avoirs financiers. A cet effet, la Conférence demande au Président de la Commission de la CEDEAO de compiler et soumettre la liste des individus et groupes d’individus concernés.
La Conférence condamne fermement les arrestations continues ainsi que l’incarcération de leaders politiques et anciens dignitaires par les autorités de la transition. Elle demande leur traitement judiciaire conformément à l’état de droit et au respect des droits de l’homme.
Au plan sécuritaire, la Conférence dénonce fermement la volonté des autorités de la transition d’engager des compagnies de sécurité privées au Mali et est très préoccupée par les conséquences certaines sur la détérioration de la situation sécuritaire au Mali et dans l’ensemble de la région.
Au titre du renforcement de la démocratie
Tenant compte des développements récents dans la région, la Conférence réaffirme que la consolidation de la démocratie et de la bonne gouvernance est essentielle pour le développement, la paix et la stabilité de la région. En conséquence, la Conférence instruit le Président de la Commission à initier le processus de réexamen du Protocole additionnel sur la démocratie et la bonne gouvernance de 2001 afin de renforcer la démocratie, la paix, et la stabilité dans notre région.
Les Chefs d’État et de Gouvernement expriment leur profonde gratitude à S.E.M. Nana Addo Dankwa AKUFO-ADDO, Président de la République du Ghana, Président en exercice de la Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement de la CEDEAO, pour son leadership dans la direction des affaires de la Communauté.
Fait à Accra, le 16 septembre 2021
LA CONFERENCE