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Friday 1 November 2024

Comment la fermeté de Biden avec Poutine jette un froid sur les relations USA/Russie

Après quatre ans avec un Donald Trump jovial, le changement de ton est radical pour Vladimir Poutine.
INTERNATIONAL – “Un tueur” qui paiera “le prix” de ses actes. Il n’aura fallu même pas deux mois à Joe Biden après son arrivée à la Maison Blanche pour déclencher la première crise diplomatique de son mandat.

En découvrant cette violente accusation envers Vladimir Poutine, infraction aux usages diplomatiques entre grandes puissances mondiales, Moscou a vu rouge ce mercredi 17 mars et immédiatement rappelé son ambassadeur aux États-Unis Anatoli Antonov.

Les propos de Joe Biden, dans une interview diffusée sur la chaîne ABC dans la matinée (vidéo ci-dessous), ont été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase de la relation entre États-Unis et Russie, rempli à ras bord depuis l’arrivée du nouveau président américain.

Sanctions, à contre-cœur

Avant que Joe Biden ne s’installe dans le Bureau ovale, Washington et Moscou ne vivaient certes pas une lune de miel, mais Donald Trump enchaînait les tergiversations, voire des moments de complicité avec Vladimir Poutine.

Que ce soit par son ton extraordinairement conciliant lors du sommet d’Helsinki en juillet 2018 lorsqu’il a semblé accorder plus de valeur aux propos de l’ancien homme fort du KGB, qu’aux conclusions unanimes des agences de renseignement américaines sur l’ingérence russe dans la campagne présidentielle de 2016.

Ou encore au sommet du G20 à Osaka en 2019, quand il avait plaisanté avec Vladimir Poutine sur l’ingérence russe dans les élections et sur les fake news(vidéo ci-dessous). Interpellé pour savoir s’il comptait demander à la Russie de ne pas se mêler de la prochaine présidentielle de 2020, il s’était tourné, amusé, vers son homologue russe tout sourire, faisant mine de le sermonner: “Pas d’ingérence dans les élections, président. Pas d’ingérence”.

Poutine, un tueur? À cette même question posée à Biden ce mercredi 17 mars 2021, Donald Trump avait répondu par une pirouette à un journaliste de la chaîne Fox News en 2017. “Il y a beaucoup de tueurs, beaucoup de tueurs. Pensez-vous que notre pays soit si innocent?”, avait-il lancé.

Une attitude qui n’a au final pas beaucoup avancé Poutine. Même si Trump s’est montré particulièrement jovial et l’a invité, avant de se rétracter devant le tollé, à la Maison Blanche, des sanctions contre la Russie ont en effet été votées et actées entre 2017 et 2020. Démocrates et républicains n’ayant pas apprécié le jeu de Trump, ils ont réussi à s’unir au Congrès pour réprimander Moscou tant bien que mal.

Poutine en est arrivé à la conclusion qu’avoir de bonnes relations personnelles n’ajoute rien à la relation entre les pays. Qu’elles soient très bonnes ou très mauvaises. Poutine ne compte pas sur les relations personnelles avec les dirigeants américains, désormais il ne s’attarde que sur les intérêts communs entre les deux États”, estime le spécialiste politique russe Stanislav Belkovsky, auprès de la radio NPR.

Retournement de discours

Une façon de voir les choses qui ne pourra pas faire de mal à la relation avec Biden, glaciale depuis des années. Lorsqu’il était vice-président de Barack Obama déjà, le démocrate avait raconté avoir rencontré le président russe et lui avoir dit: “Je vous regarde dans les yeux, et je ne pense pas que vous ayez une âme”. Une sortie qui aurait fait sourire Poutine.

Dix ans plus tard, rien ne semble avoir changé. Dès la victoire de Joe Biden, le rapport de force s’est fait sentir: alors que Poutine avait félicité Trump pour son élection moins de 24h après l’arrivée des résultats en 2016, il lui aura fallu plus d’un mois pour décrocher son téléphone et admettre que le candidat démocrate avait remporté la présidentielle de 2020.

Joe Biden n’a lui par contre pas attendu pour rendre très claire sa volonté de radicalement changer la tonalité des relations avec Vladimir Poutine (vidéo ci-dessous). S’il a revendiqué la prolongation de l’accord de désarmement américano-russe New Start, “le dernier traité entre les deux pays”, au nom de “la stabilité nucléaire”, il n’a pas mâché ses mots contre le Kremlin à peine deux semaines après son arrivée à la tête du pays.

Les États-Unis doivent ”être au rendez-vous face à l’avancée de l’autoritarisme”, a lancé Biden, évoquant “la volonté de la Russie d’affaiblir notre démocratie”. Citant l’interférence dans les élections américaines, les cyberattaques ou encore “l’empoisonnement de ses citoyens”, en référence à l’opposant Alexeï Navalny, il a tout de suite multiplié les mises en garde.

J’ai clairement dit au président Poutine, d’une façon très différente de mon prédécesseur, que le temps où les États-Unis se soumettaient face aux actes agressifs de la Russie (…) était révolu”, a-t-il prévenu le jeudi 4 février depuis le département d’État.

Washington a ensuite sanctionné début mars sept hauts responsables russes en réponse à l’empoisonnement d’Alexeï Navalny. Et ce mercredi, toujours en réponse à l’utilisation d’“armes chimiques”, le département américain du Commerce a annoncé qu’il étendait les restrictions d’exportation de produits sensibles vers la Russie. Le tout donc couronné par la sortie explosive de Biden le même jour.

À quand la première rencontre?

Ce coup de froid soudain est dénoncé depuis le mois de février par le Kremlin, qui s’agace d’“une rhétorique très agressive et pas constructive”, estime Dmitri Peskov, porte-parole de la présidence russe. Ces mesures n’améliorent pas “les chances d’une normalisation des relations”, regrette de son côté le vice-ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Riabkov.

Avec l’ambassadeur russe aux États-Unis maintenant rappelé par Moscou, la crise diplomatique a-t-elle de grandes chances de prendre une toute autre dimension? Biden comme Poutine ne semblent pas prêts à se tourner le dos, les deux grandes puissances ayant besoin d’un minimum d’échanges.

Le porte-parole russe a notamment dit espérer qu’il reste “une base pour de la coopération, malgré l’énorme quantité de différends et de différences sur des sujets-clés”. “La nouvelle administration américaine est au pouvoir depuis près de deux mois”, “c’est un bon prétexte pour essayer d’évaluer ce qui réussit à l’équipe Biden et ce qui ne lui réussit pas”, a estimé de son côté le ministère russe des Affaires étrangères, tout en assurant vouloir ”éviter” la “dégradation irréversible” des relations bilatérales.

Et Joe Bien a lui aussi encore une fois affirmé qu’il voulait pouvoir “travailler” avec les Russes “quand c’est dans notre intérêt commun”, à l’instar de la prolongation de l’accord de désarmement nucléaire New Start décidée peu après son arrivée au pouvoir. “C’est largement dans l’intérêt de l’humanité”, a jugé Biden, toujours à la recherche du compromis.

Reste maintenant à voir ce que donnera leur premier face-à-face, prévu dans aucun agenda à ce stade.

SOURCE : huffingtonpost

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