J’ai 3 messages :
1) Mes encouragements à ma fille et à tous ses camarades qui ont échoué.
2) Mes félicitations à tous les candidats admis.
3) Mes vives félicitations au ministre de l’Éducation nationale qui a su nous produire le vrai cliché du niveau de notre système éducatif.
Encore une fois, il faut donner les cours dans nos universités pour connaître le niveau très bas de notre système éducatif.
Quelles leçons en tirer
En plus de ce que le Ministre a annoncé dans son allocution, le Gouvernement guinéen doit absolument plancher sur la multiplication des écoles professionnelles dans toutes nos Préfectures.
Avec le baccalauréat de cette année, c’est plus de 90 000 adolescents qui ont échoué.
Ajouté à ceux des 2 dernières années, nous avons environ 200 000 élèves qui sont sans issues. Surtout les enfants des pauvres. L’Etat guinéen doit anticiper pour occuper ces adolescents dont le dénuement peut être une bombe pour la société.
La seule et meilleure solution consiste à construire et équiper des écoles professionnelles, à l’image des IPS que le 1er régime a institués dans les années 60 et 70.
Les régimes successifs ont eu tort de ne pas perpétuer cet héritage.
Pour un pays en construction comme le nôtre, nous avons besoin de moins d’universités.
Nous avons plutôt besoin de former des ouvriers qualifiés dans tous les secteurs.
Notre politique de coopération devrait s’orienter dans ce sens avec des pays comme le Maroc, la Tunisie, la France, la Belgique, la Turquie, la Chine, le Royaume-Uni, l’Espagne, Cuba, le Canada, la Russie, l’Allemagne, les pays scandinaves, …
Il s’agira de doter nos Préfectures d’écoles professionnelles et de centres d’apprentissage dans :
1) les métiers de la construction (Maçonnerie, Plomberie, Mensuiserie, Électricité, Construction métallique, Construction navale,..).
2) Les métiers de la technologie industrielle.
3) Les métiers de la technique agro-pastorale.
4) Les métiers du secteur social (Instituteur, Infirmier, Sage-femme, agent technique de santé,…)
5) Les métiers de la gestion, du commerce et de l’administration (Commis d’administration, Agents comptables, Transitaires, Logisticiens, Employés des banques et assurances, agents de la douane,…)
6) Les métiers de la défense et de la sécurité (Armée, Police, Gendarmerie, Garde foresterie,…)
7) Les métiers artisanaux (artisanat traditionnel)
😎 Les métiers urbains (Hotellerie/Restauration, Couture, Coiffure,…).
Toute notre diplomatie doit s’orienter sur cet axe, pour nous permettre d’avoir des infrastructures et des formateurs étrangers de qualité dans chacun de ces domaines. Nous aurons la chance de former des jeunes qualifiés et compétitifs, qui pourraient monnayer leurs talents même à l’étranger.
Comment voulons-nous que des villes comme Koundara, Yomou, Tougué, Dinguiraye, Forécariah, Gaoual, Kouroussa, Boffa, Telimélé, Mandiana, Koubia, Beyla et autres se développent si nous n’y mettons pas les structures de formation de proximité qui permettent à nos jeunes de constituer des forces vives en termes de développement local multisectoriel ?
Les Guinéens qui sont de vrais formateurs de l’enseignement technique sont tous à la retraite parce que nous n’avons pas sû capitaliser les aspects positifs du 1er régime et assurer la relève des formateurs.
C’est bien, très bien de serrer les résultats de l’enseignement fondamental. L’action serait dangereusement inachevée si nous ne valorisons pas l’enseignement professionnel pour nos enfants.
Une anecdote.
En 1973, j’ai passé le brevet avec mes amis.
Nous rêvions tous être des ingénieurs.
Nous ne visions que les Facultés de Mécanique, de Génie-civil ou d’électrotechnique à l’IPGANC.
Avoir le Brevet à l’époque, était dur comme cailloux.
Parmi nos amis qui ont échoué au Brevet, certains ne sont pas passés par 4 chemins.
Ils se sont orientés à l’école des Chemins de fer, au centre d’apprentissage technique de Fria ou de la CBG, à l’école Pratique de Commerce, à l’Ecole de la santé, dans les Instituts Polytechniques Secondaires,….
Au bout de 3 ou 4 ans de formation, alors que nous (les heureux admis au Brevet) étions encore sur les bancs, en première année de l’université ou en quête du Baccalauréat, certains de nos amis recalés au Brevet commençaient à percevoir leurs salaires.
Quand j’étais en 5ème année de l’université à l’IPGANC, un de mes amis avait déjà fondé son foyer.
Il percevait son salaire alors que nous autres attendions l’aide de nos parents pour préparer nos thèses de mémoire de fin d’études supérieures.
C’est vrai que nous sommes plus diplômés que nos amis.
Mais, ils n’ont pas été malheureux.
Ils se sont pris en charge bien avant nous. Ils ont commencé à servir leurs parents bien avant nous autres.
Mieux, certains d’entre eux ont réussi à nous défier, en se recyclant ou en prenant des cours spécialisés pour se perfectionner.
À ce jour, beaucoup d’entre eux sont aussi formés que nous, voire plus.
C’est dire que le Gouvernement guinéen doit absolument valoriser l’enseignement technique et professionnel.
L’avenir de la Guinée et le devenir de notre jeunesse résident dans ce secteur.
Ayons en vue que la Guinée est en construction.
Elle se construira par ses fils, avec une main d’œuvre qualifiée dans les métiers ci-dessus évoqués.
Si non, ce sont les ouvriers étrangers qui gagneront les futurs emplois dans les grandes entreprises du futur.
Nos enfants, sans qualification, seront dans les éternelles revendications sur fond d’un nationalisme béat.
Tous ceux qui échouent aux examens d’entrée au collège, au Brevet et au Bac, devraient trouver une autre voie pour être utiles à eux-mêmes et à la nation.
Depuis 30 ans, notre système éducatif est sur une pente dangereuse.
Pourtant, nous avons des étoiles parmi nos enfants.
Faisons en sorte que chaque enfant guinéen ait une opportunité de formation professionnelle ou d’apprentissage dans sa propre Préfecture.Nous aurons limité l’exode de la jeunesse en sédentarisant les compétences et en contribuant au développement local par l’implication des fils du terroir.
Encore toutes mes Félicitations au Ministre de l’éducation et à ses collaborateurs et surtout aux heureux admis.
Encore une fois, mes encouragements à ma fille et à tous les enfants qui ont échoué comme elle.
Vivement la qualification du système éducatif guinéen.